Pour avoir lu trop distraitement mes guides, je n’avais prévu que deux grosses journées pour voir les parcs contigus de Grand Teton et de Yellowstone : en fait, il nous a fallu trois jours et demi, et encore, sans faire de vraie randonnée ni prendre le temps de guetter les animaux qui abondent – ce qui ne nous a pas empêchés de voir très facilement des bisons, antilopes, wapitis et autres cervidés, et même un loup !
Bison solitaire et bisons en troupeau dans la plaine comme on les imaginait :
Il faut dire que le parc de Yellowstone est immense à lui tout seul (l’équivalent de la Corse), que les merveilles sont réparties aux quatre coins, donc il faut impérativement parcourir la boucle, et qu’on a envie de s’attarder un peu partout – surtout que la région n’étant pas vraiment proche des grandes métropoles, on se dit qu’on n’aura sans doute pas l’occasion de revenir de sitôt !
Après la traversée du parc de Grand Teton (dont le nom évoque bien ce que vous croyez ; l’influence des trappeurs français du 18e siècle se fait sentir jusqu’ici dans la toponymie ; il y a aussi une Gros Ventre River), nous sommes donc entrés dans Yellowstone par le sud et la zone des geysers, sources d’eau chaude, marmites de boue, fumerolles et autres bassins prismatiques (tout cela qu’on observe depuis des pontons en bois pour protéger nos vies et celle des micro-organismes qui aiment ces milieux), avant de gagner les terrasses multicolores de Mammoth Hot Springs au nord-ouest et le canyon de Yellowstone au centre.
Grand Teton
West Thumb Geyser Basin et le lac Yellowstone
Les geysers de l’Upper Basin, dont le célèbre Old Faithful, très puissant et régulier, vu depuis la terrasse du lodge.
Les sources d’eau chaude et les bassins prismatiques, dont le Grand Prismatic Spring
Partout dans le chaudron du diable, la boue et l’eau bouillonnent, tandis que les gaz sulfureux s’échappent de bouches d’enfer.
Dans le coin nord-ouest, les escaliers de travertin de Mammoth Hot Springs.
Et au centre du parc, le canyon de Yellowstone, à la fameuse pierre jaune.
Pendant tout le voyage et depuis notre retour, on nous a demandé « ce que nous avions préféré ». Question insoluble parce qu’un tel voyage est tellement riche et fait de tant de plans différents (visites de lieux touristiques, mais aussi rencontres, découvertes géographiques et culturelles, expériences quotidiennes, etc.) qu’on ne sait plus quoi mettre en avant.
Mais en visitant Yellowstone, j’ai su que c’était mon parc national préféré, à supposer qu’il faille absolument faire un palmarès. Pourquoi ? Parce qu’on voit dans cette immense caldeira volcanique un éventail inouï de choses exceptionnelles (il y a trois autres zones de geysers dans le monde : l’Islande, la Nouvelle-Zélande et le Kamtchatka, mais les plus spectaculaires sont ici).
Et parce qu’à la différence des parcs nationaux comme le Grand Canyon, les Arches, Bryce Canyon, Yosemite, etc., etc., qui offrent des paysages grandioses mais relativement statiques, Yellowstone présente le spectacle d’une terre vivante. Comme le magma affleure sous une fine couche de moins de quatre kilomètres d’épaisseur, en surface ça gicle, ça siffle, ça crache, ça crachote, ça clapote, ça glougloute, ça pétille, ça borborgyme, ça gargouille, ça ronfle, ça bouillonne – de l’eau, de la boue, des gaz. Et c’est une expérience sensorielle totale : en plus des bruits, il y a l’arc-en-ciel des couleurs, l’odeur de soufre du nuage soufflé par le vent, la vapeur d’eau chaude qui rend la peau moite. Avec l’effet de surprise d’un petit geyser qui se réveille pour jouer sa partition précisément à notre passage, ou au contraire l’attente anxieuse devant l’Old Faithful, le vieux fidèle qui ce matin tarde à se manifester et dont le jaillissement arrive comme une libération.
C’est à Yellowstone que j’ai fait le plus de mini-vidéos, alors en voilà un petit échantillon ici pour vous donner un avant-goût, mais ça ne remplacera pas le fait d’y aller. Et dépêchez-vous : National Geographic vient de publier un article prédisant que ce super-volcan pourrait bien entrer en éruption dans un avenir pas si lointain et provoquer une mini-apocalypse. Vous êtes prévenus.