En raison de leur relatif isolement, les « basses terres » de Caroline du Sud, faites de marécages et d’îles côtières, ont permis la préservation de la culture des Gullahs, descendants d’anciens esclavages importés d’Afrique de l’Ouest et autrefois employés dans les plantations d’indigo, de riz et de coton.
Chaque année en novembre a lieu un festival sur St. Helena Island, dans les locaux du Penn Center, une école pour anciens esclaves ouverte par des Quakers venus de Pennsylvanie en 1862 (en pleine guerre de Sécession, donc, et alors que l’esclavage n’était pas encore aboli ; c’est ce qui s’appelle avoir la foi). Martin Luther King y avait ses habitudes et y écrivit nombre de textes.
Nous arrivons un peu tard pour profiter de l’essentiel des réjouissances (expositions, parades…), mais pas pour goûter la cuisine locale (crevettes, poisson, riz, ananas), ni participer à la soirée dansante du samedi et au service œcuménique du lendemain.
« Mais on va être les seuls Blancs », s’inquiétaient les enfants. C’est un fait que nous ne passons pas inaperçus, mais nous sommes accueillis à bras ouverts.
Rencontre extraordinaire en particulier avec Lynn et Victoria (à gauche et au centre sur la photo). Elles sont sœurs, disent-elles sans plus de précision, comme pour jauger notre réaction. En fait, leurs parents se sont rencontrés dans les années 1960. Lui noir, elle blanche, tous les deux veufs et à la tête de familles nombreuses. Ils se sont mariés deux semaines après l’assassinat de Martin Luther King en 1968 – mais dans un Etat du Nord parce que les mariages interraciaux étaient interdits en Caroline du Sud. Dès que la déségrégation a été effective, Lynn a choisi d’aller dans l’école pour Noirs que fréquentaient ses frères et sœurs. Confrontée au racisme des Blancs, elle en a un moment éprouvé de la haine, mais elle a su la dépasser. Ella a raconte son histoire dans un livre : I am Black and I am Proud, Wished the White Girl (Je suis noire et j’en suis fière, aurait voulu dire la petite Blanche).
Evoque-t-on l’élection de Trump ? Pas d’amertume, aucun esprit de revanche, la simple expression d’une fermeté digne et pleine d’espérance. Entendre parler de joie, de paix et d’unité fait du bien, d’autant qu’on n’a pas affaire à des idéalistes naïfs, mais à des gens qui ont personnellement vécu le combat pour les droits civiques, qui savent ce qu’est le racisme, mais qui ont choisi et choisissent encore de ne pas répondre à la haine par la haine.
Ci-dessous, la galerie d’art qui expose les artistes locaux.
Sur l’île voisine de Hunting Island, le parc d’Etat qui attire d’ordinaire près d’un million de visiteurs par an en raison de la richesse de sa faune a été très durement touché par l’ouragan Matthew. Impossible d’emprunter ses pistes, toutes coupées par des arbres !