Les Américains ont le don de créer des légendes à partir de faits historiques finalement limités dans le temps. Le Pony Express ? Un an et demi (1860-1861). L’âge d’or des cow-boys et des grands convoyages de troupeaux ? Maximum 20 ans, entre 1865 et 1885. Alcatraz, prison de haute sécurité ? 30 ans, entre 1934 et 1963.
Il faut dire que le face à face entre l’île et la ville de San Francisco, à peine éloignée de deux kilomètres et pourtant pratiquement inaccessible à la nage à cause de la température glaciale de l’eau et des forts courants, est des plus romanesque.
San Francisco, si proche, si loin.
Et puis ces trente années ont été riches en événements propres à soutenir l’intérêt pour la prison, entre la présence d’hôtes de marque comme Al Capone (tiens, la Prohibition : 13 ans seulement, entre 1919 et 1933), des mutineries comme la « Bataille d’Alcatraz » en 1946 et les 14 tentatives d’évasion toutes plus originales les unes que les autres, jusqu’à la dernière en 1962, tellement géniale qu’on espère tous que Clint Eastwood s’en sort à la fin.

Les trois auteurs de l’évasion de 1962 – et leurs mannequins.
Rappel des faits : ils ont creusé le mur de béton à la petite cuillère (!) et sont partis par les conduites techniques après avoir laissé des mannequins à leur place dans leur lit. Et on ne les a jamais retrouvés.
Cette évasion est expliquée dans le détail lors de la visite du pénitencier, de même que les conditions de vie des prisonniers. On apprend aussi qu’avant d’accueillir une prison pour « détenus irrécupérables », Alcatraz a abrité une citadelle, puis une prison militaire. Qu’après la désaffectation de la prison, elle a servi de catalyseur aux mouvements de lutte en faveur des Indiens, qui ont symboliquement revendiqué l’île à la fin des années 1960. Et qu’aujourd’hui le service des Parcs nationaux à qui elle a été confiée s’occupe aussi beaucoup d’entretenir les inattendus jardins (créés par les familles du personnel pénitentiaire et les détenus) et de protéger les oiseaux qui nidifient sur l’île.
Si seulement tout pouvait toujours se terminer avec des fleurs et des oiseaux…